You're All I Want for Christmas

Casey & Nate (Chez Nate | 24 Décembre 2018)

La barbe taillée, les cheveux domptés et la chemise bien ajustée, ridicule. Nate se trouvait ridicule à sourire et à s’impatienter comme un ado allant à son premier rendez-vous. C’était bien l’impression que cette scène devait donner alors qu’il peaufinait les derniers détails avant l’arrivée de Casey. Un Nate presque nerveux, empressé. Il avait fait tellement d’efforts, que lui trouvait absurdes tellement ils ne lui ressemblaient pas, mais qu’il espérait aussi plaire à la jeune femme. Peut-être même les trouverait-elle romantiques. Un sourire. L’exact opposé du brun, il fallait l’avouer, alors il n’en savait rien. Dans tous les cas, elle ne pourrait être qu’étonnée de ce qu’il avait fait pour l’impressionner, que cela soit en positif ou non. Mais il était certain qu’il ne craignait rien avec Casey et son esprit si innocent et sincère. L’une des raisons pour laquelle il l’aimait tant.

Il s’arrêta dans le coin salle à manger de son salon, transformé légèrement pour l’occasion afin de s’approcher du feu qui s’embrasait dans l’âtre de la cheminée. Pas trop près non plus, pour ne pas mettre la jeune femme mal à l’aise. Quelques ajustements sur la table dressée aux couleurs de la saison. Bougies, décorations de toutes sortes. Combien de temps avait-il passé sur internet, dans des boutiques artisanales, pour faire de son mieux et plus encore ? Oh il ne l’avouerait sans doute jamais, mais cela pouvait se compter en heures. De longues heures. Il n’était pas peu fier du résultat malgré ses goûts différents. Et que dire du repas ? L’aiguille avait filé à toute allure alors qu’il avait tenté de parfaire ses bien piètres talents culinaires, sans grand succès. Nate avait fini par opter pour la simplicité dans ses plats afin de limiter les risques et surtout le temps passé en cuisine. Préparer une dinde à lui tout seul, s’occuper de la cuisson, mission impossible. Et pour deux personnes seulement en plus ? Il fallait voir plus modeste. Tout était donc réuni pour ne pas choisir cette option.

Le vieux tourne-disque résonnait dans la pièce alors que lui finissait par tourner en rond, incapable de s’occuper autrement alors que le réveillon approchait à grands pas. Il attisa les flammes dans la cheminée, s’assurant que le feu vivrait encore quelques temps avant d’avoir à s’en occuper à nouveau puis… La sonnerie retentit et un large sourire s’afficha sur son visage. Elle était là, enfin. Et ils seraient seuls. Une pensée égoïste le gagna alors qu’il était heureux de pouvoir passer cette soirée seule en sa compagnie, sans sa fille. Est-ce que cela faisait de lui un mauvais père ? Peut-être. Mais en cet instant, c’était l’homme amoureux qui avait le dessus et non la figure paternelle. Il veilla à ne pas recevoir de cendres sur lui alors qu’il se leva rapidement pour atteindre l’entrée et découvrir la silhouette dont il ne pouvait plus se passer. Sans attendre, la porte s’ouvrit et dévoila une Casey resplendissante. Il ne put retenir un sourire amoureux, la dévorant presque du regard, et se contenta d’un simple « Bonsoir » avant de l’embrasser, de l’enlacer et de l’inviter à entrer pour une soirée qu’il ne serait pas prêt à oublier.

Casey était toute nerveuse devant le miroir de sa chambre chez Grace. Elle s'était achetée une petite robe il y a déjà quelques temps, noire et classique avec une jolie dentelle fine qui habillait tout en dévoilant un peu de peau. Elle aimait s'apprêter pour lui. Elle fit les dernières retouches maquillage, très léger d'ailleurs et puis vérifia sa coiffure, elle avait remonté ses cheveux pour dévoiler sa nuque, sachant très bien qu'il adorait y poser les lèvres. Elle devait avouer avoir beaucoup pensé à lui en se préparant… finalement, elle avait enfilé une paire de bas, une petite veste rouge et tout le reste pour lui tenir chaud, le manteau et l'écharpe… le bonnet n'était pas une option vu sa coiffure. Elle alla embrasser Grace et ses enfants qui s'apprêtaient à souper en famille et posa leurs cadeaux sous le sapin avant de filer, en voiture pour ne pas congeler sur le court trajet. Casey lui avait demandé à plusieurs reprises si elle pouvait l'aider pour quoi que ce soit mais le jeune homme avait refusé à chaque fois. Il s'occupait de tout, c'était ce qu'il lui avait dit à chaque fois. Alors elle lui avait fait confiance et elle avait hâte de découvrir ce qu'il avait préparé tout en s'attendant pas à un changement radical. C'était Nate.

Elle sonna à la porte et ça lui fit étrange également. Enfin dernièrement, elle arrivait souvent avec lui ou alors elle entrait directement, ça lui était également arrivé régulièrement. Mais là, elle n'osait pas alors elle attendait impatiemment et nerveusement que son homme vienne lui ouvrir. Elle n'eut pas à attendre longtemps et elle découvrit un Nate habillé pour les fêtes. Il était splendide. Elle frissonna légèrement à son regard et se dit qu'elle avait hâte d'enlever son manteau pour voir sa réaction. Elle adorait voir son regard s'assombrir de désir quand il la regardait… c'était le seul à lui donner l'impression d'être si belle et désirable. Rapidement dans ses bras, elle lui rendit son baiser et lui sourit tendrement. Elle caressa sa joue et se redressa pour un nouveau baiser. Elle était si heureuse d'être là. C'était leur premier réveillon ensemble, encore une étape… enfin elle le pensait. Elle retira son manteau et rougit légèrement au regard qu'il porta sur elle en souriant. Liant sa main à la sienne, elle lui sourit encore et toujours. "Et si tu me dévoilais tout ça ?" Elle avait toujours été très curieuse et même si elle savait se faire violence, elle avait hâte de voir ce que cet homme qu'elle aimait avait préparé pour eux. Ils firent quelques pas et elle découvrit la transformation du coin à manger. Étonnée, les yeux grands ouverts de surprise, elle s'approcha pour observer la table toute décorée qu'il avait préparée tout seul, enfin elle l'imaginait.

Les yeux brillants de joie, elle se tourna vers lui. "J'ignorais tes talents de décorateurs. C'est magnifique. Vraiment !" Retournant dans ses bras, elle lui sourit. "Et si tu me dévoilais tout le reste ? Je suis curieuse… comme toujours…" Un léger rire lui échappa, se doutant qu'il ne voudrait rien lui dévoiler pour garder la surprise. Posant son petit sac sur le canapé, elle en sortit les cadeaux et alla les poser sous le sapin en lui faisant un clin d'œil. "Comme ça, j'serais pas la seule à être curieuse." Elle se mit à rire et posa ses lèvres sur les siennes. "Notre premier Réveillon…" Ses derniers mots furent presque un murmure. Elle était heureuse en cet instant, enfin cela faisait quelques temps déjà. Elle retrouvait confiance en lui, vraiment confiance. Son attitude lors de la soirée aux étoiles l'avait rassurée et il l'avait sortie d'une situation qui était en train de la faire paniquer rapidement et sans une seule question. Il l'avait soutenue par sa présence et éloignée du danger. Elle se rappelait avoir tremblé tout le retour et ne s'être calmée qu'une fois arrivée chez Nate et surtout grâce à sa présence. Chassant ses pensées négatives, elle observa autour d'elle. Un feu ronronnait dans la cheminée, la table était apprêtée pour les fêtes, la maison toujours décorée. Et puis elle se trouvait dans les bras de l'homme dont elle était amoureuse pour le Réveillon de Noël.

Nate avait sans doute été trop confiant à vouloir tout gérer pour cette soirée. La décoration, le repas… Ce qui s’ajoutait déjà à l’appréhension de trouver, parmi d’autres, le cadeau parfait pour la jeune femme. Autant dire qu’il en avait passé du temps à plancher sur ces sujets, à essayer, à s’entraîner. A faire et à défaire. Tant de fois, jusqu’à ce que le résultat soit parfait. Oh, il ne le serait jamais pour le professeur, un brin perfectionniste, mais il trouvait ses préparations dignes d’un réveillon de Noël et, surtout, digne de la compagnie qu’il aurait. Tout était donc prêt, ou presque, lorsque la sonnette de la porte d’entrée retentit alors que Nate commençait à faire les cent pas chez lui. C’était particulièrement agréable, cette courte attente entre la sonnerie et la découverte de l’autre, cet instant en suspens, comme s’ils allaient à un premier rendez-vous officiel. Cette palpitation des premières amours qu’elle était la seule depuis des années à lui faire ressentir. Difficile à croire que Nate devenait ce coeur tendre en sa présence, lui qui se montrait si distant et léger le reste du temps. Pourtant, il en avait besoin, terriblement. Il avait besoin de cette douceur pour oublier à quel point il avait pu être amer et blessant auparavant. Le brun se doutait bien qu’il ne s’était pas métamorphosé en innocence pure grâce à la jeune femme et qu’il risquait de retomber dans ses travers à tout moment, mais il profitait de ces moments de parfaite douceur pour s’améliorer au fil du temps et se découvrir plus attentionné que jamais.

La silhouette qu’il découvrit, malgré des vêtements chauds, le fit sourire et il ne put s’empêcher de l’attirer vers lui pour l’embrasser et l’enlacer. Et tout fut partagé avec autant de tendresse. Et dire qu’à peine deux mois auparavant, ils auraient été incapables d’être dans la même pièce sans regards fuyants, méfiants. Ils en avaient fait du chemin jusqu’à ce réveillon de Noël amoureux et ô si enivrant lorsqu’elle ôta son manteau avec l’aide de Nate qui découvrait par la même occasion ses courbes divines dans cette robe, qu’il ne connaissait pas, si séduisante. Et ce cou dénudé, si rare avec cette jeune femme aux cheveux souvent détachés. Il laissa libre court à sa main qu’il suivait du regard et parcourait déjà ce flanc, cette taille et ses hanches, ensorcelé. Le regard troublé de désir. Le souffle confus d’avidité. La jeune ingénue savait comment s’y prendre pour le rendre fou d’elle. Pas maintenant. Il mit fin à ce contact rapidement avant de ne pouvoir s’arrêter, déjà presque ivre de sa présence, et se refusa de déposer ses lèvres dans son cou pour les mêmes raisons. Ses yeux sombres retrouvèrent la clarté des siens pour y découvrir cette légère gêne qui la gagnait à chaque fois qu’il la regardait ainsi mais aussi le désir réciproque qui devrait pourtant attendre. La voyant rougir, il ne put retenir l’envie de jouer avec cette pudeur que lui n’avait pas en privé. Il se baissa légèrement pour lui murmurer à l’oreille ce qu’il comptait faire de cette robe plus tard après avoir évoqué sa beauté, d’un regard insistant accompagné d’un sourire presque imperceptible. Elle deviendrait écarlate, sans nul doute, et lui craquerait encore plus.

La jeune femme lia sa main à la sienne et lui demanda de lui montrer ce qu’il avait préparé. Il lui rendit son sourire, sachant qu’elle serait surprise par tous les efforts fournis. En tout cas, il l’espérait. Son regard fut une réponse plus que convenable. Oh oui elle était surprise. Elle s’était peut-être attendue à une bougie avec une quelconque décoration, histoire de dire qu’il avait fait des efforts. Mais non, il avait sorti le grand jeu. Lui-même s’en étonnait lorsqu’il revoyait tout ça avec elle, mais les yeux de Casey suffisait à le convaincre qu’il ne s’était pas trompé en agissant ainsi. « J’ai plein de talents cachés... » Qu’il lui sortit avec un sourire espiègle, sous-entendant qu’elle n’était pas au bout de ses surprises. Et lui n’avait plus qu’à espérer pour que son repas soit comestible. Puis elle voulut découvrir le reste, comme si Nate allait tout dévoiler maintenant… « Si tu restes sage, peut-être ? » Il s’en amusa alors qu’elle alla déposer des cadeaux au pied du sapin déjà bien habillé. Ils n’avaient pas à s’en soucier ce soir puisque Joyce n’était pas là, parfait. Et elle ne serait pas la seule à être curieuse… Il rit légèrement avec elle avant de lui rendre son baiser. « Il faudra attendre demain en plus, avec Joyce. » Nate la taquinait un peu en attisant sa curiosité de la sorte puisqu’il comptait bien lui donner au moins un cadeau le soir-même. Et il savait exactement lequel. Leur premier réveillon. Sourire, presque accompagné d’un soupir. Sa façon de le dire, c’était étrange, mais il avait l’impression qu’il allait en vivre encore bien d’autres avec elle. Le brun la regarda observer les alentours. Elle avait l’air si heureuse, le temps des regards tristes et vides était bien loin, et Nate ne pouvait qu’être un peu plus satisfait d’en être au moins partiellement à la source. Il la serra encore plus dans ses bras pour qu’elle se blottisse contre lui et il finit par déposer ce fameux baiser dans son cou. Puis il se détacha légèrement d’elle avant de l’inviter à rejoindre le coin repas et cette table décorée avec soin – et beaucoup de sites internet – et donner le coup d’envoi de ce moment qui pourrait tourner en catastrophe à la moindre erreur. Il resta donc attentif à sa première proposition de la soirée. « J’ai prévu plusieurs bouteilles, qu’est-ce que tu préfères ? » Elle lirait entre les lignes et comprendrait qu’il parlait de bouteilles d’alcool et d’autres sans. A elle de décider. Et quoiqu’elle décide, il ne commenterait pas et approuverait.

Tous les deux partageaient quelque chose de particulier, elle ne pouvait le nier. Et puis tout allait si vite depuis leur retrouvaille. Parfois, elle avait l'impression que ces quelques mois de douleurs n'avaient pas existé, que tout cela n'avait été qu’un cauchemar enfin terminé. Le sourire qu'il lui offrit dès qu'il l'aperçut fit bondir son cœur tandis qu'elle se blottissait contre lui en lui rendant son baiser. Elle entra à sa suite et le laissa lui ôter son manteau. Sa réaction ne l’étonna pas et la ravit. Elle frémit en rougissant tandis que son regard et l'une de ses mains découvraient cette nouvelle petite robe… elle l'avait achetée pour lui, enfin en partie du moins. Elle l'adorait mais savait également que Nate l'apprécierait encore plus. Souvent, dans ces cas-là, elle se demandait s'il résisterait à la tentation… Ils avaient une relation, qui aujourd'hui n'étaient plus uniquement basé sur le côté physique mais ce côté-là restait une importante part de leur couple, d'eux. Et elle espérait bien que ça resterait ainsi encore longtemps. À ce niveau-là, elle n'avait jamais été aussi à l'aise, aussi en confiance qu'avec lui et jamais, au grand jamais, aussi demandeuse… Il résista, ses yeux reprirent leurs couleurs. Mais bien sûr, c'était Nate, en la voyant rouge, il ne pouvait laisser les choses en état. Quand il se pencha sur elle pour lui murmurer ce qu'il pensait de cette petite chose et ce qu'il comptait en faire plus tard… elle devint immédiatement écarlate.

Main dans la main, il l'emmena à sa demande pour découvrir ce qu'il avait préparé. Certes, ce n'était que quelques pas, mais elle avait envie de voir et elle avait surtout envie que ce soit lui qui lui fasse découvrir tout cela. Elle fut étonnée et émerveillée de tout ce qu'il avait fait. La table était splendide et elle ignorait clairement ses talents à ce niveau-là. Enfin, elle ne l'avait jamais vu dresser une table… et elle ne l'avait pas imaginé être du genre à le faire. Plein de talents cachés, elle n'en doutait pas une seule seconde. Elle tenta le coup en lui demandant de lui faire découvrir tout le reste. La curiosité restait un grand trait de caractère chez la jeune femme. Évidemment, il refusa… enfin si elle restait sage peut-être. Ce qui voulait clairement dire qu'elle ne saurait rien de plus pour le moment. Une fois les cadeaux déposés sous le sapin, elle revint dans ses bras pour un baiser. Elle fit une moue boudeuse quand il lui annonça que pour les cadeaux, il faudrait attendre le lendemain avec Joyce. "Ah non, hein ! Au moins un ce soir…" Elle rit et puis après un baiser en étant dans ses bras, elle murmura quelques mots. Leur premier réveillon. C'était ce que c'était et elle espérait que ce ne serait pas le dernier. Elle était heureuse avec lui. Oh elle était consciente que ce ne serait certainement pas rose à ce point en continu… mais elle ne souhaitait pas y penser pour le moment, profitant simplement de cette période heureuse. Il ne répondit rien au fait que ce soit leur premier réveillon mais le sourire qu'il lui offrit voulait tout dire et surtout le fait qu'il resserre son étreinte pour qu'elle se blottisse entre ses bras.

Elle frémit doucement quand ses lèvres vinrent se poser dans son cou et puis lui sourit quand il se détacha d'elle. Elle le précéda pour rejoindre la table et s'installa. Levant les yeux sur lui, elle lui sourit. Elle s'était attendue à une question du genre, évidemment, c'était les fêtes. Elle y avait réfléchi longuement les derniers jours… elle avait jusque-là éviter tout alcool afin de ne prendre aucun risque de rechutes. Mais aujourd'hui, elle avait envie de tenter le coup. Elle était sûre de ne pas retomber dans l'enfer et puis Nate ne la forcerait pas à quoi que ce soit, elle le savait. "Je veux bien un verre d'eau…" Elle se mordit la lèvre et lui sourit. "Mais je prendrais volontiers un petit verre de vin également." C'était une nouvelle évolution, mais elle lui faisait suffisamment confiance pour oser boire un verre ou deux en sa compagnie. Elle n'exagérerait pas, évidemment, mais elle aurait plaisir à ce que le repas soit accompagné d'un bon vin. Le repas… elle se posait plein de questions dessus d'ailleurs… était-il passé par un traiteur et il lui suffirait de réchauffer les choses au fur et à mesure ou s'était-il lancé à fond en cuisinant de A à Z.

Elle le laissa disparaître, il alla chercher le vin et l'eau. Enfin c'est ce qu'elle imaginait tandis qu'elle prit son téléphone pour le mettre sur silencieux. Même s'il y avait peu de chance qu'elle soit dérangée ce soir, elle aimait autant ne même pas entendre la sonnerie d'éventuels SMS pour lui souhaiter un bon réveillon. Elle le glissa au fond de son sac qu'elle alla déposer plus loin, au pied du canapé. Elle se réinstalla en lissant sa robe. Nate revint vite, elle lui sourit, amoureusement. "Je me demandais… tu as cuisiné toi ?" Elle avait maintenant un sourire joueur sur les lèvres. "Dis-moi si tu as besoin d'un petit coup de main… même si je suis pas d'une utilité extraordinaire en cuisine…" Elle lui tendit la main. "Tu as pas trop galéré pour le cadeau de la petite ? Et les autres…" Un léger rire lui échappa. Bien sûre qu'elle cherchait à en savoir plus tout en sachant pertinemment qu'elle ne saurait rien et dans le fond, elle espérait bien qu'il ne lui dise rien. Elle adorait les surprises… Mais il fallait toujours qu'elle cherche à savoir quand même. Ça la démangeait et elle mourrait envie de savoir tout en ne voulant pas savoir. Pleine de contradiction cette demoiselle.

Est-ce qu’il était trop tactile ? Sans nul doute. Il s’en était voulu d’être aussi impérieux, de l’avoir tant été le peu de temps qu’ils avaient passé ensemble au printemps, lorsqu’elle lui avait reproché à plusieurs reprises de n’avoir cherché que cet aspect charnel dans leur relation. Pourtant, tous ces doutes s’étaient évaporés à la seconde où elle lui avait souri, où elle avait accepté son contact. Oh oui, il réclamait sans cesse le contact de la jeune femme depuis, mais il était comme ça. Physique. Totalement. Par pure envie d’abord, puis c’était devenu sa façon d’exprimer ce qu’il ressentait, à défaut des mots. Cela faisait sans doute de lui un homme immature, incapable de s’engager dans autre chose qu’une relation de la sorte, mais au fond lui savait qu’il y avait plus. Bien plus. Et il espérait qu’elle aussi l’avait compris, avec tous les signes qu’il laissait. Ces gestes en public, ce réveillon, ce soutien sans faille depuis deux mois. Sa fille. Que pouvait-il lui offrir de mieux qu’une place aux côtés de celle qui avait le plus d’importance dans sa vie ? Honnêtement, lui-même ne saurait que faire d’autre pour lui prouver qu’il prenait leur relation on ne peut plus sérieusement. D’autant qu’elle avait eu un aperçu d’un tout autre Nate au fil des années, en tant que collègues, qu’amants, qu’anciens amants devenus amis puis méfiants. Elle savait, elle devait savoir que c’était différent cette fois, non ? Il n’avait quand même pas besoin de lui dire ?

En tout cas, son regard et ses gestes avaient eu le mérite de lui annoncer comment il comptait finir la soirée. Enfin, il trouva tout de même le moyen de l’énoncer clairement. Au cas où. Ça, c’était bien plus facile à dire. Elle était écarlate, pari réussi. Bon, d’accord, ça fonctionnait à chaque fois, il n’y avait pas de quoi se vanter. Ils allèrent ensuite découvrir le coin préparé uniquement pour la soirée et le lendemain, afin de fêter ce premier Noël en famille. Enfin, tous les deux, puis tous les trois. Pas en famille. Nate décida de jouer avec la patience de la jeune femme en lui annonçant qu’elle aurait à attendre jusqu’au lendemain pour ouvrir ses cadeaux. Sa moue boudeuse était adorable. Heureusement qu’il avait de toute façon prévu lui en offrir un dans la soirée, il aurait dû craquer sinon. Il sourit, lui laissant comprendre qu’elle aurait ce qu’elle voulait de toute façon. Comme souvent depuis leurs retrouvailles. Le professeur avait toujours eu tendance à ne pas savoir lui dire non, même lorsqu’ils ne se fréquentaient pas vraiment. Sans doute sa tendance à vouloir plaire, mais il aimait se dire qu’il y avait eu une autre raison. Qu’elle lui avait plu, vraiment. Et maintenant, parce qu’il voulait tout faire pour la rendre heureuse et ne plus voir cette tristesse, ces larmes s’évader sur ses joues. Parce qu’il l’aimait et ne se sentait pas capable de lui refuser quoi que ce soit. Encore plus quand elle se blottissait dans ses bras de la sorte et ne lui laissait aucune chance de se défaire un jour de cette dépendance qu’il avait pour elle. Et tant mieux.

Une fois ce bref amoureux contact sur son cou, il était temps de l’inviter à s’asseoir à table et de lui poser la question qui se voulait attentionnée. En d’autres mots, alcool ou non ? Il ne l’avait jamais poussée à consommer à nouveau ce genre de boisson et avait même fait des efforts de son côté pour ne pas la tenter en buvant devant elle, mais il fallait bien avouer qu’il tenait à ce qu’elle reprenne confiance en elle. Au fait qu’elle soit capable de se contrôler, de ne pas chuter à nouveau. En lui, qui ne l’entraînerait jamais jusqu’à l’ivresse et ne tenterait pas de profiter de la situation, d’aucune sorte. Il fut presque déçu lorsqu’elle lui demanda un verre d’eau même s’il ne laissa rien transparaître et s’apprêtait à faire volte face pour aller lui chercher lorsque son expression changea. Le sourire du brun ne pouvait qu’affirmer qu’elle venait, maintenant, de lui donner la réponse qu’il attendait. Un petit verre de vin. C’était un début. Et il était ravi qu’elle se sente prête à franchir le pas. « Je vais te chercher ça... » Qu’il ponctua d’un nouveau sourire avant de s’envoler vers la cuisine. Un vrai bazar par ici, bref. Il prit une carafe d’eau, la bouteille de vin et sortit le nécessaire pour présenter l’entrée par la suite. Nate revint cependant vers Casey pour poser ce qu’il avait en mains et la servir. Un verre d’eau, un petit verre de vin. Ce qu’elle avait demandé, précisément. Il avait bien fait de prévoir les deux verres à son couvert. Tout en versant le vin, il écouta la jeune femme prendre la parole. Est-ce qu’il avait cuisiné, lui ? Il jeta un coup d’oeil et découvrit son sourire joueur qu’il ne put qu’imiter. Elle osait insinuer qu’il n’en était pas capable ? Il fit mine de ne pas prendre en compte l’affront, d’être trop occupé à ne pas mettre du vin partout. Ce qu’il était vraiment, d’ailleurs. Et puis, il s’était donné trop d’efforts pour les gâcher en plein réveillon en acceptant son aide. Il lui donna son verre de vin, pas trop rempli comme convenu avant d’écouter sa dernière question. Cadeaux, cette fois-ci. Oh, il aurait pu lui répondre pour Joyce, mais avec la suite… Il la regarda d’un air qu’on pourrait croire innocent, sauf pour ceux qui le connaissaient. « Vous êtes bien curieuse ce soir Mademoiselle Connors... » Il termina par un sourire tout aussi imperceptible aux yeux non entraînés. Il avait pris l’habitude, de temps en temps, de l’appeler comme ça. Sans doute pour rappeler cette période où ils se voyaient en secret et ne pouvaient paraître proches à l’université. Retrouver ce jeu, ce presque danger d’être démasqués à la moindre erreur. A l’époque, tout ça l’avait inquiété, bien entendu, mais il ne pouvait cacher qu’il avait aussi apprécier cette situation disons… stimulante. Oh, et quand elle l’appelait professeur… Elle savait y faire.

Il la laissa à son espièglerie pour retourner à la cuisine quand le tourne-disque retro grésilla pour annoncer la fin du vinyle en cours. Demi-tour, puis il se retrouva rapidement face à l’objet pour relancer la musique d’ambiance, histoire que ce ne soit pas trop silencieux. Et surtout parce qu’il adorait ces vieux classiques de soul et de blues. Et parce qu’il les trouvait, peut-être, un peu romantiques ? Oh, et sans doute parce qu’ils s’étaient souvent retrouvés dans ce club de Burlington, bien sûr… Une fois le premier morceau lancé et le tourne-disque soigneusement remis en place, Nate reprit le programme prévu. La cuisine, l’entrée. Tout en invitant la jeune femme à ne pas se gêner pour choisir elle aussi la musique d’ambiance. « S’il y en a un autre qui te plaît, dis-le moi. » Et il ferait le changement. Lui-même. Parce que personne ne touchait à son tourne-disque, même pas Casey. Il faisait partie de ces objets bien trop précieux pour prendre le moindre risque. Non pas qu’il n’avait confiance en la jeune femme mais… il préférait ne pas laisser la possibilité de lui en vouloir si elle s’y prenait mal. Bref. Le brun était déjà dans la cuisine et prit l’entrée. Tout ce qu’il y avait de plus simple. Quelques tranches fines de saumon fumé, quelques fines herbes, un peu  de citron, et le tour était joué. Le tout présenté d’une façon plutôt agréable – merci internet, à nouveau. Il ne lui restait plus qu’à croiser les doigts pour que la jeune femme apprécie et ne se retrouve pas malade dans la minute. Et même plus tard, d’ailleurs. Non sans nervosité qu’il dissimula, il revint auprès d’elle avec les assiettes en mains et servit Casey avant d’aller à sa place et s’asseoir, enfin. Le brun souriait, attendant la réaction de la jeune femme. Elle trouverait sans doute qu’il avait fait trop simple pour un réveillon, que ce n’était pas assez bien présenté, que… Stop. C’était parfait. Le mieux qu’il puisse faire sans rater une cuisson de pâte feuilletée, comme il avait testé mille fois pour une autre recette trop complexe. Le mieux qu’il puisse faire, c’était déjà bien non ? Tout ça, rien que pour elle, pour l’impressionner, pour lui dire qu’elle était aussi importante que sa fille et qu’il était prêt à tout pour elle. Même cuisiner. Et laisser apparaître sa nervosité dans un regard impatient.

Elle ne put que bouder quand il lui annonça qu'elle devrait attendre le lendemain pour les cadeaux… mais quoi qu'il arrive, elle saurait le convaincre. Au moins un ce soir, c'était le minimum. Évidemment, quand il avait une idée en tête Nate pouvait être du genre borné, mais elle savait l'adoucir… enfin elle le pensait. En découvrant son sourire, elle sut qu'elle avait gagné. Elle n'était pas sûre à proprement dit avoir gagné, il l'avait sûrement prévu comme cela, mais même c'était une petite victoire quand même. Casey se blottit à nouveau dans ses bras, parce que c'était là qu'elle était bien. C'est là qu'il profita pour poser ses lèvres dans son cou et qu'elle frissonna longuement avant de s'installer à la table. La question suivante la fit sourire intérieurement, elle garda son sourire pour elle en lui demanda de l'eau avant de sourire pour lui. Elle y avait longuement réfléchi, et en sa compagnie, elle pouvait s'autoriser un peu de vin. Elle avait suffisamment confiance en lui et en elle pour cela. Pour boire dans un bar pas encore, mais ici, c'était différent. Le sourire qui lui offrit fut unique en son genre, il semblait si heureux qu'elle ait demandé un verre de vin, qu'elle se sente en confiance pour le faire. Du moins, c'est comme ceci qu'elle le voyait. Tandis qu'il allait chercher les boissons, elle se débarrassa de son sac et de son téléphone qu'elle déposa au pied du canapé avant de revenir s'asseoir.

Il fut vite de retour et elle posa la question qui lui brûlait les lèvres. Avait-il cuisiné ? Elle n'insinuait même pas spécialement qu'il n'en était pas capable même si elle savait qu'il le prendrait plus ou moins comme cela… elle proposa son aide également mais elle eut juste droit à un sourire joueur, le reflet du sien imaginait-elle. Vu qu'il semblait bien concentré à verser le vin, elle posa une autre question qui lui brûlait les lèvres sur les cadeaux cette fois-ci. Elle ne demanda pas ouvertement ce qu'il avait trouvé, mais il comprit tout de suite où elle voulait en venir vu qu'il l'observa d'un air faussement innocent en l'accusant amusé d'être curieuse. Oh oui, mais ça, il le savait pertinemment. Un air angélique sur le visage, elle haussa doucement les épaules en répondant à son sourire par un sourire. Elle le connaissait suffisamment aujourd'hui pour repérer la plupart de ses expressions, même celles à peine visible. Le retour du "vous" et du "mademoiselle connors" la fit frémir doucement. Oh oui, elle se rappelait parfaitement la période où il l'appelait comme ça en public… un petit côté interdit sans l'être vraiment… le jeu qui s'était instauré entre eux lorsqu'ils étaient en public… léger mais bien là, jeu qui la faisait toujours rougir, heureusement que c'était quelque chose qui pouvait passer facilement avec la jeune femme qui était connue pour rougir pour tout et surtout pour rien. Rentrant dans le jeu qui ne durerait pourtant pas, elle lui répondit après avoir battu des cils, charmeuse. Plus charmeuse qu'à l'époque d'ailleurs, elle était bien plus timide avec lui à cette période. "Ca ne devrait plus vous étonner… Professeur…" Un léger accent ajouté sur le professeur. Oh oui, elle savait très bien qu'il avait particulièrement aimé quand elle l'appelait comme cela… Un petit interdit en plus qui n'en était pas vraiment un.

Il fila à la cuisine mais fut stoppé par la fin du vinyle qu'il changea avant de retourner en cuisine. Il lui proposa de lui dire si elle avait envie d'écouter un morceau particulier et elle hocha simplement la tête. Nate avait de bons goûts musicaux, relativement proche des siens quand il s'agissait de soul, de blues ou de jazz. Ces musiques lui rappelaient que de bons souvenirs… les soirées passées en sa compagnie à la maison ou dans le club de Burlington. Elle en était venue à ne presque écouter plus que cela… sauf quand elle partait courir. Mais pour le plaisir, toujours ce genre-là. Elle but une gorgée d'eau en l'attendant, elle dégusterait le vin avec lui tout en sachant qu'il serait excellent, il choisissait en général très bien. Elle leva la tête pour le voir revenir avec deux assiettes. Elle ne pouvait s'empêcher de sourire parce qu'elle était avec lui, parce qu'il avait fait l'effort de leur préparer un repas et de décorer avec goût… souvent ils mangeaient côte à côte dans le canapé, c'était un changement tout à fait appréciable. Et pas de pizza ce soir, dieu merci ! Elle découvrit l'entrée, du saumon fumé présenté joliment dans l'assiette. Elle leva les yeux sur lui. Nate souriait mais il y avait autre chose et au lieu de répondre dans la seconde, elle chercha à découvrir ce qu'il pensait. Elle reconnut l'impatience, elle connaissait bien cet air chez lui et puis autre chose… qu'elle n'arriva pas à définir tout de suite. "Choix parfait, j'adore le saumon fumé. En plus l'assiette est vraiment jolie, ça donne envie."

Elle tendit une main vers lui pour caresser doucement ses doigts. Et soudain Casey reconnut l'expression… le soulagement était venu remplacer la nervosité. C'était tout à fait charmant et cela l'étonnait à chaque fois de découvrir la nervosité chez Nate. Il n'était pas vraiment sujet à cela, enfin avant leur dernière retrouvaille, elle ne l'avait jamais vraiment vu chez lui. Depuis qu'ils s'étaient retrouvés… ce n'était pas régulier, mais ce n'était pas la première fois non plus. Leur relation avait changé, évolué. Et elle espérait simplement que ce soit pour le mieux. Ne pouvant deviner ce que le jeune homme ressentait, elle ne pouvait qu'espérer que ce soit pour le mieux. Elle, elle savait. Elle était amoureuse de lui et garder le silence à ce sujet était de plus en plus difficile. "Tu as fait de sacré efforts d'après ce que je comprends… et c'est réussi !" Elle lui sourit. Ils trinquèrent à cette soirée avant de boire une gorgée puis commencer à manger. Le saumon était délicieux, fondant et tendre. Elle leva les yeux sur lui et lui sourit.

Elle avait à nouveau confiance en lui, elle s'en rendait compte plus que jamais aujourd'hui. Oh certes, il y aurait toujours des zones d'ombre mais cela faisait partie de la vie. Mais la confiance était là. Il l'avait soutenue et ramenée en sécurité alors que la secte faisait à nouveau une apparition et qu'elle avait presque été en état de choc, tremblante, elle serait sûrement restée tétanisée sur place si ça n'avait pas été de Nate. Ce soir-là, il l'avait soutenue et rassurée avant de tout lui faire oublier dans une nuit passionnée après qu'elle se soit calmée lentement. La conversation allait bon train entre eux même si ses yeux se perdaient parfois au centre de ses introspections.

Elle but une gorgée de vin en l'observant, un sourire au coin des lèvres. Ce soir, elle était pleine de contradictions… elle ne voulait pas que cette soirée se termine. Et de l'autre côté, elle avait hâte que le repas se termine alors qu'il venait de commencer… mais c'était juste pour voir son visage quand il ouvrirait son cadeau. En pensant à Noël, elle avait changé d'idées au moins deux cent fois… ça avait été hyper compliqué de trouver quelque chose d'unique et qui corresponde à cet homme.  

Trop impatient de revenir vers elle, Nate n’avait pas tardé dans la cuisine avec la carafe d’eau et la bouteille de vin. Il était plus que satisfait qu’elle ait fini par accepter sa proposition de boire un verre en sa compagnie. Le brun avait veillé à ne jamais paraître trop insistant à ce sujet, sachant qu’il faisait référence à une période de leurs vies qu’ils préféraient tous les deux oublier, mais… Il avait toujours tenu à ce qu’elle soit consciente qu’elle pouvait avoir une entière confiance en lui et qu’elle pouvait prendre n’importe quel risque avec lui, qui serait là à chaque fois pour s’assurer que tout allait bien. Oh, il ne s’attendait pas à se retrouver avec une Casey téméraire prête à tout et n’importe quoi, mais au moins avec une femme en pleine confiance. Ou disons plutôt confiante comme au printemps dernier. Le professeur savait qu’il n’aurait jamais à faire à une jeune femme avec une assurance débordante, et ça ne le gênait en rien. Au contraire. Cette retenue, cette timidité légère, faisaient partie des raisons pour lesquelles il était tombé sous son charme. Et il s’en rappelait à chaque fois qu’elle rougissait devant lui. Pour lui, qu’il se disait. A son retour, Casey devint curieuse et l’interrogea. La cuisine ? Besoin d’aide ? Et pour les cadeaux ? Quelle curiosité. Mais surtout, une parfaite occasion de jouer un peu avec elle et leur passé commun. D’un air totalement innocent, il s’était laissé aller à l’interpeller comme lorsqu’ils étaient à l’université et ne tenaient pas à rendre leur relation publique. Pour diverses raisons, inutiles d’y repenser.

Professeur. Bien sûr qu’il l’avait attendu, celui-là. Nate adorait jouer avec elle comme il adorait la voir se prendre au jeu. Il ne put retenir un sourire en la voyant battre des cils devant lui et l’entendre répondre de la sorte. Elle était bien loin la Casey de l’époque qui n’osait presque pas le regarder sans devenir écarlate. Très loin, à son plus grand plaisir. Quoique, il fallait avouer qu’il avait particulièrement apprécié cette tension qu’il y avait eu entre eux à chaque fois qu’ils passaient de l’interdit à la passion, une fois les regards indiscrets absents. Sans prendre le risque de poser ses yeux sur elle et de voir le désir l’emporter, il baissa le regard un instant avant de retourner dans la cuisine chercher l’entrée. Un arrêt pour relancer la musique qui semblait convenir à la jeune femme qui n’objecta pas et ne se leva pas à la rechercher d’un morceau qui lui plairait plus. Il fallait dire que Nate avait sélectionné soigneusement ce qui lui paraissait être le mieux pour cette soirée alors… il aurait été tout de même un peu déçu qu’elle cherche autre chose. Sauf s’il y avait eu une raison particulière. Mais non, il n’y en avait pas. Casey était sagement assise, à l’attendre, alors qu’il revint de la cuisine avec deux assiettes. Il ne tarda pas à lui présenter avant de s’asseoir, en silence, bien trop impatient de savoir ce qu’elle en pensait. Impatient mais surtout nerveux. Et si elle n’aimait pas ? Trouvait ses efforts ridicules ? Il imaginait tout et rien à la fois, et la façon dont elle le regardait sans un mot commençait à faire monter la pression. Pourquoi ne disait-elle rien ? C’était si pire que ça ? Puis elle finit par parler. Parfait. C’était parfait. Et même joli ? Le professeur n’avait pas besoin de tant pour être soulagé, rassuré, et se dire qu’il aurait au moins réussi un plat dans la soirée. Parce que, même s’ils n’avaient pas goûté encore, qui pouvait rater un saumon fumé ?

Avait-elle remarqué sa nervosité ? Nate le soupçonna à son geste délicat, à sa main rejoignant ses doigts pour les caresser. Il était si content d’avoir réussi son pari, de lui présenter un repas qui avait bien plus d’allure que toutes les pizzas ou tous les plats commandés qu’ils avaient dévorés sur le canapé. La pression retombée, il pouvait être complètement serein et honnête après sa remarque. « T’as pas idée du temps que j’ai passé pour cette pauvre assiette ! » Oui, il avouait à demi-mot qu’il était mauvais en cuisine mais aussi qu’il avait fait de très grands efforts pour elle. Juste pour elle. Sa remarque était spontanée et gâchait sans doute un peu le moment qu’ils passaient, tendre et délicat. Mais c’était sans doute au mieux pour le brun qui n’était pas si à l’aise que ça avec le romantisme. Un peu, ça lui allait, mais il ne fallait pas lui en demander trop. Alors, cette réflexion sortie du fond du coeur était sans doute une façon de se détacher de cette ambiance doucereuse qui ne lui ressemblait pas. La plaisanterie, c’était plus ça son domaine. Où était-ce parce qu’il était nerveux pour la fin de soirée et cherchait à se calmer avant de lancer les choses sérieuses ?

Puis ils commencèrent à manger, à discuter d’un peu de tout. Nate en oubliait presque les enjeux de la soirée. Un premier réveillon de Noël tous les deux, rien que tous les deux. Il l’oubliait, presque. Et, maintenant qu’il était relativement confiant sur le repas qui défilait sous les yeux de Casey, c’était une autre interrogation qui le tourmentait. Et si elle n’aimait pas ce qu’il lui offrirait ? Nate. Il fallait absolument arrêter avec toutes ces questions, tous ces doutes. Le plat était prêt. Un filet de canard assortis de légumes poêlés. Là aussi il s’était contenté d’aller vers la simplicité, même si la cuisson de ce fichu canard lui avait donné du fil à retordre. Puis, le plat laissa place au dessert avec une tradition dans la famille O’Reilly. L’une des traditions à vrai dire. Plusieurs mince pies, achetées chez un pâtissier bien plus doué que lui. Il fallait bien, pour faire honneur à ces petits gâteaux délicieux qu’il avait eu pour habitude de dévorer chez lui. Enfin, chez sa mère. Bref, ce n’était pas le moment de penser à elle. Le brun n’avait pas prévu de dessert fastueux, sachant que le reste avait été déjà assez copieux et puis… le magnifique gâteau serait pour le lendemain avec la petite. Alors qu’il avait apporté puis posé le plateau recouvert de ces petits plaisirs, il fit un détour par le sapin. Le fameux sapin décoré à six mains. Sans doute pas le plus beau, pour certains, mais clairement le plus majestueux aux yeux de Nate. Il en était fier, comme il était fier des changements dans cette maison. Tous les changements, dont les siens, personnels. Plus de colère, plus de rancoeur, plus de non-dits. Juste le bonheur d’être ensemble. Il se baissa pour ramasser non pas un paquet mais deux. Les plus petits. Pour ne pas dire les plus ridicules tellement ils étaient fins et légers. Pourtant, il n’avait aucun doute. Aucun. En vérité… il était terriblement angoissé. Elle ne refuserait pas, non ?

Retournant auprès d’elle et l’invitant à le suivre sur le canapé en face du feu qui crépitait toujours autant, il était aussi impatient que nerveux. Encore plus qu’au début du repas. Il l’observa un instant, son regard se posant sur ce collier qu’elle portait toujours. Enfantin pour certains, le symbole de tant de choses pour Nate. L’espoir, le souvenir, un rappel de ne plus jamais faire la même erreur qu’auparavant avec la femme qu’il aimait. Il soupira, s’interdisant de l’embrasser avant qu’elle ait découvert les cadeaux. Au moins le premier, histoire de faire durer le suspense. Des deux, il choisit le plus fin pour commencer. Le plus facile à expliquer. « Ouvre celui-là en premier. » Une simple enveloppe. Pas de lettre dedans, même s’il aurait sans doute mieux fait s’il voulait un jour lui dire tout ce qu’il ressentait mais… ce n’était pas l’objectif du moment. Une enveloppe et tout un tas de tickets. Avion, hôtel, spectacle. Il avait tout prévu, dans les moindres détails. Ou pas, si elle préférait en profiter au jour le jour. Un long week-end à New York, à Broadway, comme il s’était promis de lui offrir quand ils s’étaient retrouvés en avril dernier. Le professeur n’avait pas hésité à choisir ce qu’il y avait de mieux, tout en restant raisonnable, pour passer quelques jours rêvés avec elle. Elle n’avait plus qu’à ouvrir et à satisfaire le regard attentif de Nate. L’autre cadeau attendrait, un peu. Le temps que l’appréhension monte encore d’un cran.

En confiance, elle l'était à nouveau, ce n'était pas pour rien qu'elle avait accepté de boire un verre de vin en sa compagnie. Oh, elle savait très bien depuis le début qu'il ne la forcerait pas ou ne la soulerait pas, ce n'avait jamais été son genre… mais pas suffisamment à l'aise, elle n'avait pas encore bu une seule goutte d'alcool, enfin c'était jusqu'à ce soir. Aujourd'hui, bien avec lui, bien avec elle-même, elle pouvait se laisser aller à un ou deux verres pour le plaisir et juste pour cela. Pas d'excès ce soir. Plus d'excès avant longtemps certainement. Entre la curiosité de la demoiselle et le côté joueur de Nate, la suite la fit sourire. Un petit jeu, des mots venant du passé mais qui lui redonnait un certain frisson… Professeur… elle l'avait souvent appelé comme cela, avec une petite accentuation du mot pour bien insister… elle savait très bien à l'époque ce que cela lui faisait, enfin elle ne l'avait pas compris tout de suite mais avait finir par quand même voir son regard changer légèrement et cette hâte qu'il finissait toujours par avoir. À y penser, leur relation avait passé par tellement de stade… d'abord plus charnel qu'autre chose bien qu'une amitié s'était vite installée entre eux quand même. Et puis une amitié agréable bien qu'ils ne se voyaient pas très souvent quand même. Les retrouvailles avaient été intense également, toujours très physique bien qu'il y ait eu quelque chose de plus. Certes, elle l'avait souvent accusé après avril de n'avoir été avec elle que pour cela et même si elle l'avait parfois pensé… ça avait surtout été pour expliquer son silence total, sa froideur extrême… Aujourd'hui, leur relation était toujours très physique et elle le serait toujours, du moins l'espérait-elle… mais il n'y avait pas que cela, loin de là même. Déjà, elle en était amoureuse, follement. Et puis, il devait ressentir quelque chose de fort également, il lui avait présenté sa fille, l'avait soutenue autant qu'il le pouvait… et puis il y avait aussi ce soir… un petit je ne sais quoi d'unique.

Elle ne put s'empêcher de jouer un brin quand il revint et quand elle vit vraiment l'impatience dans ses yeux, elle lui avoua tout. Enfin sur l'entrée. Un très bon choix et puis l'effort était remarqué et remarquable. Quand elle réussit enfin à lire ce qu'elle n'arrivait à définir dans ses yeux, elle caressa ses doigts en lui affirmant voir les efforts qu'il avait fourni et qu'en plus, tout cela était très réussi. Voir de la nervosité chez Nate, ce n'était pas spécialement courant. Il était si sûr de lui. Elle sourit à son aveu, tout simplement en rosissant très légèrement. Cela la touchait vraiment qu'il ait fait tant d'effort pour lui faire plaisir, pour lui offrir un vrai réveillon en amoureux… parce que même si aucun mot n'avait été mis sur ce qu'ils ressentaient tous les deux, ce n'était pas juste une aventure sans lendemain… ça ne pouvait pas l'être. Elle ne pouvait lire dans son cœur, savoir ce qu'il ressentait et elle n'était pas certaine qu'il le sache vraiment lui-même. Tandis qu'ils commencèrent à manger, la discussion battit son plein. Le silence ne les dérangeait ni l'un, ni l'autre, mais ils étaient capables de parler de tout et de rien pendant des heures également. Enfin de rien… ils avaient toujours des sujets intéressants liant parfois littérature et géographie ou alors sur la musique ou encore tant d'autres sujets aussi éclectiques qu'ils pouvaient l'être.

La suite du repas fut aussi étonnante que délicieuse. Les cuissons réussies, les assaisonnements aussi. Elle était vraiment impressionnée et elle se demandait presque combien de temps il avait passé en cuisine avant aujourd'hui pour maîtriser parfaitement le plat principal… le connaissant, elle était presque sûre qu'il avait fait au moins un essai. Juste pour être sûr de ne pas se louper. Il avait une tendance à vouloir être parfait, c'était relativement typique de lui. Elle le connaissait suffisamment pour le savoir. Elle fut absolument ravie du dessert, elle adorait les minced pies, même si elle en mangeait en général une seule fois par année, durant les fêtes de Noël. Sa Granny en faisait une délicieuse d'ailleurs. Elle allait sûrement devoir en manger encore un peu dans les prochains jours, elle devra aller lui dire bonjour et lui souhaiter un joyeux Noël quand même. Elle était passée ce matin et même si elle avait été un peu déçue en apprenant que Casey ne serait pas là le soir-même, elle l'avait bien pris. Bien sûr, elle lui avait annoncé sans discussion possible qu'elle voulait rencontrer ce jeune homme le plus vite possible et ce… même si Casey n'avait pas précisé avec qui elle passait les fêtes. La réaction de sa grand-mère l'avait fait rire, comme souvent. Heureusement qu'elle ne passait pas Noël toute seule d'ailleurs.

Après qu'il ait déposé le dessert, il fit un détour par le sapin avant de l'inviter à le suivre sur le canapé. Elle s'installa avec lui. Il lui remit une enveloppe. Et toute excitée, elle l'observa un instant, Nate, pas l'enveloppe. Il avait un deuxième paquet dans les mains, pourrait-elle ouvrir deux cadeaux ? "Deux… mais je suis chanceuse !" Elle remarqua sa légère nervosité mais n'en fit pas de cas. Il lui avait demandé d'ouvrir celui-ci en premier, elle allait s'exécuter. Elle ouvrit l'enveloppe et puis en jetant un coup d'œil, elle vit qu'il y avait plein de chose. Le premier ticket fut un spectacle. Les yeux grands ouverts, elle découvrit ensuite un billet d'avion, une réservation d'hôtel… le tout pour New-York, un spectacle à Broadway, une comédie musicale. Les yeux brillants, elle se tourna pour presque lui sauter dans les bras et l'embrassa longuement. "Oh mon dieu… un week-end à New-York… un spectacle à Broadway… tu es parfait !" Elle se mit à rire en regardant une fois encore les différents papiers. "Olala… c'est vraiment parfait, merci, merci beaucoup." Un sourire en coin, elle l'observa. "Ca fait si longtemps que je suis pas retournée en ville en plus. J'ai hâte." Elle se fit soudain un peu de souci pour son propre cadeau… mais tant pis. Elle avait quand même hâte de voir sa réaction.

Elle alla chercher un sac, pas tout petit mais pas gigantesque, le cadeau était très fin. Elle le lui remit avec un baiser sur les lèvres. Toute nerveuse, elle jouait avec ses mains, impatiente qu'il ouvre. C'était un vinyle qu'elle savait qu'il ne possédait pas malgré le fait que ce soit l'un de ses jazz man préféré. Et ce n'était pas juste un vinyle standard, mais un ancien, il était aussi ancien que sa sortie et dédicacé. Certes, ce n'avait pas été dédicacé pour Nate vu que cet homme était mort depuis bien longtemps, mais elle était tout de même à son nom. Elle avait mis des semaines à le trouver et avait fait des recherches assidues… une dédicace toute simple "A Nate." avec la signature, mais c'était un cadeau unique… elle l'espérait qu'il le verrait comme ça du moins. Elle avait passé des heures au téléphone avec un disquaire passionné de la Nouvelle Orléan, le berceau de nombreuses musiques de ce genre. C'était d'ailleurs lui qui avait trouvé son bonheur. Selon le vendeur, le son était unique, différent de ce qu'on trouvait plus facilement sur le marché parce que c'était un vrai ancien vinyle. L'observant, elle voulait lire chaque expression sur son visage. Ce n'était pas aussi fou que son cadeau… mais elle espérait simplement qu'il aimerait.

Passer des heures en cuisine ? Très peu pour Nate. Alors, des jours ? Quel cauchemar. Et, pourtant, c’était ce qu’il avait fait cette dernière semaine pour s’assurer que le réveillon de la veille de Noël serait parfait. Parfait, ça ne pouvait pas être autrement. Ça ne devait jamais être autrement. Le brun était un perfectionniste assumé, d’où une tendance à l’arrogance puis à la susceptibilité lorsqu’on pointait du doigt ses failles, mais surtout un homme éperdument amoureux qui voulait tout faire pour que la soirée fonctionne à merveille. Alors, oui, il avait passé des heures et des heures à chercher des recettes, à les tester, à s’entraîner pour que ce moment soit le plus réussi. Le meilleur Noël de toute une vie, si ce n’était pas trop prétentieux d’y prétendre. Oh, ça n’avait jamais dérangé Nate de voir grand, au contraire. Il mettait sans doute la barre haute pour leurs prochains rendez-vous, trop haute même, mais c’était de loin le dernier de ses soucis en cet instant. Là, il se demandait si le repas convenait. L’une des ironies de la soirée. Lui, si sûr de lui et impassible, qui se retrouvait à appréhender l’avis de ce petit bout de femme sans vraiment cacher cette légère nervosité. Tout ça, pour un bout de viande et quelques légumes. C’était ce que le Nate d’avant aurait pensé. Il se serait sans doute même trouvé ridicule dans cette situation, dans cette scène trop romantique pour cet homme d’habitude si pragmatique et classique. Pour ne pas dire d’un ennui mortel. Comme quoi, les sentiments qu’il avait pour elle pouvaient faire des miracles. Même pour ce coeur d’habitude si froid.

Le dîner se déroulait à la perfection, malgré quelques petites erreurs que Casey ne put relever puisqu’elle ne savait tout ce qui était prévu. Rien de bien important, même si le professeur ne pouvait s’empêcher d’être un peu déçu le temps d’une seconde ou deux en voyant que le résultat n’était pas toujours à la hauteur de ses attentes. Enfin, le sourire de la jeune femme parvenait à chaque fois à lui faire tout oublier. Toujours. Ce sourire qui avait le don de chasser de son esprit toutes les pensées sombres qui tentaient si souvent de ramener Nate à ses vieux démons. Une arrogance débordante. Une colère incontrôlable. Un silence assourdissant. Ils guettaient tous pour l’envahir à nouveau, à chaque fissure qui se dévoilait, à chaque faiblesse qui s’échappait. Mais elle, elle était toujours là. Pour lui sourire, pour le regarder avec tant d’affection. Pour lui rappeler qu’il n’avait pas à être cette personne détestable, qu’il n’avait pas à définir sa vie par rapport à celles des autres. Qu’il pouvait être heureux, lui aussi. Tout simplement. Si seulement il était capable d’exprimer tout cela, de lui dire ce qu’il ressentait pour elle, toute l’importance qu’elle avait prise dans sa vie qu’il n’imaginait plus sans elle. Pourquoi le ferait-il alors qu’elle lui apportait tout ce dont elle avait besoin et encore plus ? Nate avait donc trouvé une autre manière de lui prouver. Un réveillon fastueux, un cadeau démesuré. Totalement. Mais un cadeau qu’il rêvait de lui offrir depuis des mois déjà. Il l’avait donc invitée à le suivre sur le canapé pour le dessert, déposé sur la table basse, et s’était installé non pas avec un mais deux cadeaux. Et dire qu’il avait essayé de lui faire croire qu’elle n’en aurait aucun de la soirée…

Oh oui, c’était une chanceuse. Nate sourit à sa remarque et l’invita à ouvrir le premier paquet. D’une finesse et d’une légèreté imbattable. Cette simple enveloppe qui contenait tout le nécessaire pour passer un week-end parfait à New York. Le brun la laissa découvrir le contenu sans un mot, savourant chaque réaction, chaque regard brillant, avant de la retrouver à son cou. Il reçut avec plus de bonheur que de passion son baiser qui dura plus longtemps que les précédents. Elle avait l’air si heureuse, son rire, son sourire… Tout. Le voyage était presque déjà oublié pour Nate qui ne profitait que de la scène que Casey lui offrait en appréciant ainsi son cadeau. Il effleura délicatement de ses doigts la joue de la jeune femme avant de lui dire dans un sourire « Je suis content que ça te plaise... » Bien sûr qu’il l’était, comme s’il avait besoin de le dire… Il ponctua sa phrase d’un baiser furtif, énième preuve qu’il ne pouvait plus se passer d’elle et de son contact. Pourtant, il dut la laisser s’échapper à lui pour quelques secondes lorsqu’elle se leva chercher le cadeau qu’elle avait sélectionné pour la soirée. Elle était si nerveuse et Nate trouvait ça si adorable. La jeune femme n’avait pourtant pas à s’en faire, le professeur était persuadé qu’elle avait fait un excellent et puis… au fond, même s’il était impatient de savoir ce qu’elle lui avait trouvé, ce n’était pas ce qui comptait le plus pour lui. C’était ça, ce moment, cette soirée. La simplicité d’un instant passé tous les deux. Peut-être pas si simple, d’ailleurs, mais c’était le Noël dont il avait toujours rêvé. Casey revint rapidement et déposa un baiser rapide sur ses lèvres en lui remettant son cadeau dans les mains. Un seul coup d’oeil et Nate avait compris. En tout cas, il en était quasiment certain. Un objet de cette taille et si fin, ça ne pouvait être qu’un vinyle. Et elle avait eu raison de se lancer dans cette direction puisque le brun ne manquait jamais une occasion d’agrandir sa collection. Mais quel titre avait-elle choisi ? Il prit son temps à le dévoiler en la regardant, pour faire durer le suspense. Ou pour garder le contrôle d’une situation qui lui échappait complètement, peut-être. Une triste habitude qu’il n’avait toujours pas perdue. Un vieux vinyle, et pas n’importe lequel. Une pièce rare, d’un interprète qu’il adorait. Extrêmement surpris, il ne fit pas attention à ses paroles et lâcha la première pensée qui lui traversa l’esprit. « Ça a dû te coûter une fortune Casey… ! » disait celui qui venait de lui offrir un week-end à New-York. Ironique. Mais leur situation était différente, Nate savait que le statut de doctorant n’avait pas que des avantages. Dont un porte-monnaie pas toujours très rempli. Il la regarda un instant, un sourire aux lèvres. Elle y avait pensé.

Puis il retrouva des yeux le vinyle qu’il détaillait sous toutes ses coutures. Il était un peu abîmé, mais c’était ce qui lui donnait tout son attrait. Et cette dédicace. A Nate. Pas lui, bien entendu, mais… Oh, elle avait dû passer tellement de temps à trouver cette perle rare. Un petit bijou qui, il le savait déjà, serait le vinyle le plus précieux de sa collection. Pas parce qu’il était ancien, pas parce qu’il était d’un de ses interprètes favoris, pas parce qu’il était dédicacé. Parce qu’il venait d’elle. Qu’elle avait pris le temps de le trouver, pour lui. Quand était la dernière fois qu’on lui avait porté une telle attention ? Il sourit, perdu dans ses pensées, se rendant compte de son extrême chance. Levant les yeux sur elle, il l’observa un instant comme pour imprimer ce moment dans sa mémoire. S’assurer qu’il n’oublierait jamais ce bonheur parfait qui contrastait tant avec l’année chaotique qu’il venait de passer. « Merci... » Et un regard qui lui criait, s’il le pouvait, tout l’amour qu’il ressentait pour elle. Oh non, il ne s’était pas trompé pour ce deuxième cadeau. Nate finit par reprendre ses esprits et sortit délicatement le vinyle de sa pochette. Comme s’il avait l’objet le plus précieux en main, comme si… Son regard s’arrêta à nouveau sur Casey quelques secondes, immobile, avant qu’il ne se lève pour le placer sur le tourne-disque à la place de celui qui retentissait depuis quelques temps déjà. D’une grande finesse dans les gestes, comme à chaque fois qu’il manipulait ses vinyles, mais sans doute un peu plus ce soir. Il apposa le diamant sur le 33 tours et ferma les yeux pour profiter pleinement du son si agréable. Si pur. Loin des ré-enregistrements trop lisses qui se faisaient actuellement. Nate resta là, sans bouger, quelques secondes, avant de se décider à bouger et rejoindre la femme qui lui avait offert ce petit bijou et méritait bien qu’il la remercie comme il se devait. Une fois à son niveau, il ne se rassit pas mais lui tendit la main pour qu’elle le rejoigne pour ce qu’elle avait toujours l’habitude de lui réclamer lors de leurs sorties au club de blues. Une danse. Une simple danse, juste tous les deux. Personne à les regarder. Sans doute pas grand-chose pour un regard extérieur, mais Casey saurait que ce n’était pourtant pas une évidence pour lui. Lui qui faisait tout pour s’extraire à ses invitations, à ses demandes parfois insistantes.

Oh, ça ressemblait sans doute plus à une étreinte amoureuse qu’à une danse, mais le coeur y était. Dans son intégralité. Nate finit par laisser ses doigts se perdre sur la peau de la jeune femme. Sa taille, son bras, son épaule. Avant de rejoindre son visage qu’il finit par attirer vers lui pour un baiser plus amoureux que passionné. Il n’avait pas envie de ça, pas pour le moment, il voulait juste savourer sa présence, faire durer ce moment le plus possible. Sauf qu’il avait posé les yeux sur ce deuxième cadeau qui n’attendait qu’eux. L’appréhension revint, soudaine. Pourquoi ? Il n’avait pas à douter. Il ne fallait pas douter. Alors, pour mettre fin à cette presque torture qu’il dissimulait à la jeune femme, il finit par se détacher légèrement d’elle, le temps d’attraper cet écrin. Un écrin à collier, il n’était pas fou au point de lui présenter un autre type d’écrin, plus petit, et lui faire la frayeur de sa vie. Ou le pire faux espoir.

Il lui tendit le paquet, le visage impassible. Signe de sa nervosité mais surtout de ses pensées qui commençaient à se bousculer dans son esprit. Il fallait lui expliquer, qu’elle ne s’imagine pas tout et n’importe quoi en découvrant ce qu’il avait mis dans cette boîte fine. Mais par où commencer ? Fallait-il dire clairement ce que l’objet signifiait ? Ce qu’il ne signifiait pas ? Le pourquoi de ce choix ? De cette invitation ? De cette proposition ? Trop de questions pour une simple clé. Une simple clé. Mais il y avait tellement derrière cette simplicité. Cette envie d’être avec elle, tout le temps. Cette envie d’officialiser encore un peu plus leur relation. Cette envie de lui dire à quel point il l’aimait, sans le pouvoir. Il l’observa alors, avec toutes ces envies en tête, alors qu’elle déballait le cadeau. Silencieux. Plus pour longtemps, alors qu’elle était sur le point d’ouvrir l’écrin. « Casey... » Il ne pouvait plus reculer, maintenant que l’objet se dévoilait. « Je te demande pas venir vivre ici demain ou… je sais que c’est encore trop tôt pour ça. Mais je veux que tu saches que tu peux venir quand tu veux, que je sois là ou pas, que tu me préviennes ou pas. Et si jamais tu veux venir vivre ici... tu peux. » Mais la tirade était loin d’être terminée. Et, pour une fois que Nate s’était lancé… « Je veux en parler à Joyce, de nous. Je sais très bien qu’elle a compris qu’on était pas qu’amis mais… je veux lui dire, qu’elle sache à quel point tu comptes pour moi et... » Tout ça était de plus en plus laborieux à dire, mais il ne pouvait pas s’arrêter maintenant. Encore un peu. Juste un peu. « je sais que je pourrai jamais effacer mes erreurs mais… je peux… je suis fou de toi Casey... » Un regard fuyant mais tout aussi suppliant de mettre fin à cette torture. Qu’elle lui réponde, ce qu’elle voulait, c’était tout. Il était presque fébrile. Vulnérable, comme jamais. Et si elle trouvait que c’était trop ? Un voyage à New-York. Une proposition sans doute un peu folle. Et des effusions lyriques qui ne lui ressemblaient absolument pas. Et pourtant, elles étaient sorties. Eh bien, pour quelqu’un qui avait du mal à exprimer ses sentiments et qui avait peur de se perdre dans cet océan de pensées… Ce n’était pas si mal.

La soirée était particulière et unique. Casey avait la rare possibilité d'observer Nate moins sûr de lui, cela le rendait d'autant plus humain. Oh, humain il l'était, bien sûr, mais il avait toujours ce désir de perfection et cette assurance qu'il était… parfait ou du moins pas très loin de la perfection. C'était une des choses qui faisait son charme, évidemment, et que beaucoup trouvait sûrement agaçant. Mais c'était Nate, elle ne voudrait le changer pour rien au monde. Elle était tombée amoureuse de lui avec ses qualités et ses défauts. Le tout faisait partie de son charme et elle en avait vu la plupart des côtés… autant les bons que les moins bons, voir carrément certains très mauvais côtés. Et même ça, ça n'avait changé en rien ses sentiments, aujourd'hui, elle en était consciente. Certes, elle ne lui en avait encore rien dit, parce qu'elle ne se sentait pas encore prête à le faire, elle avait, à vrai dire, trop peur de sa réaction. Et s'il se sentait piégé ? Et s'il fuyait à nouveau ? Elle en aurait le cœur brisé, assurément.  Elle y survivrait mais c'était une douleur qu'elle n'avait aucune envie de vivre. Parfois quand elle l'observait la regarder, elle avait l'impression, presque la certitude que quelque chose de profond les liait… elle avait également ce sentiment quand ils partageaient un moment avec la fille de Nate et parfois simplement quand elle se trouvait dans ses bras. Sa tendresse avait une saveur particulière depuis leurs retrouvailles. Pourtant, elle n'arrivait pas à vraiment définir tout cela, la peur l'en empêchait, mais était-ce seulement cela ? Le léger manque de confiance qu'elle pouvait avoir en elle-même jouait également un rôle important, cela ne faisait aucun doute.

Ce qu'elle remarquait aujourd'hui, c'était les efforts qu'il avait fait pour cette soirée. Titanesque selon elle parce qu'elle ne l'imaginait pas vraiment expert en décoration et elle connaissait ses talents culinaires plutôt limité. Il avait dû s'entraîner… Cette soirée, elle la trouvait d'ailleurs très romantique, même si elle ne le dirait pas à haute voix… c'était si peu le genre de Nate, bien plus terre à terre que romantique. Oh oui, il en avait des gestes romantiques, elle n'était juste pas sûre que lui les voient ainsi. Elle le complimenta longuement, le repas était vraiment réussi, tout était parfait aux yeux de la jeune femme. Elle passait un moment exquis qui était accompagné de plats délicieux et que dire de la compagnie ? Parfaite pour elle. Casey n'avait pas cessé de sourire et de rire au cours de cette soirée, de ce repas accompagné de deux verres de vin pas trop rempli. Elle avait vu le sourire satisfait du jeune homme quand elle lui avait demandé un deuxième petit verre d'ailleurs. L'atmosphère de cette soirée était unique, il était rare qu'il laisse paraître ses failles. Vraiment très rare.

Une fois le repas terminé, il l'invita à le suivre au salon pour qu'ils s'installent tous les deux sur le canapé. Le dessert était disposé sur la table basse et donnait envie à la jeune femme mais d'autres choses plus importantes se déroulaient. Les cadeaux. Deux cadeaux en plus. Curieuse comme elle l'était, elle adorait les surprises et les cadeaux, évidemment. Le premier cadeau qu'elle ouvrit la scotcha… un voyage à New-York, un hôtel des plus classe, une comédie musicale à Broadway… il la gâtait énormément. Et surtout, surtout il s'était souvenu qu'elle adorait les comédies musicales et qu'elle rêvait d'aller à un spectacle à Broadway, ce qu'elle n'avait jamais eu l'occasion de faire lorsqu'elle vivait dans la métropole. Les yeux brillants d'excitation, elle ne put s'empêcher de passer en revue une seconde puis une troisième fois les billets avant de s'approcher de lui pour un long baiser. Un baiser empreint de passion mais duquel la tendresse qu'ils ressentaient l'un pour l'autre sortait en maître. La caresse sur sa joue et ses quelques mots la firent sourire un peu plus si cela était possible. "Tu me gâtes bien trop…" Un énième baiser, très court et puis elle s'échappa pour aller récupérer l'un des cadeaux pour Nate. Elle voulait le lui offrir ce soir celui-là… quand ils étaient seuls. Pas parce que c'était gênant parce qu'elle avait envie de voir ses émotions sans qu'il ne les cache... Horriblement nerveuse, elle jouait avec ses mains tout en l'observant, attendant avec impatience qu'il se décide à l'ouvrir. Elle voulait voir ses réactions et elle espérait tant que cela lui plairait. Un vinyle lui aurait plus quoi qu'il arrive, il adorait élargir sa collection, mais celui-là était particulier… unique.

Elle savait bien que Nate aurait deviné ce que c'était en le voyant. Difficile de faire plus unique q'un vinyle au niveau de la forme et surtout de la finesse de l'objet. Il prenait son temps et la demoiselle devint presque fébrile. Il parut surpris et elle ne put que lever les yeux au ciel à sa première remarque. Une fortune, une fortune tout était relatif. Mais Nate souriait, le cadeau lui plaisait, il l'examina sous toutes les coutures d'ailleurs et elle vit quelque chose passé dans ses yeux lorsqu'il découvrit la dédicace. Elle n'osait pas interrompre le cours de ses pensées et puis un simple merci… simple merci qui lui suffisait amplement. Elle lisait milles choses dans les yeux de Nate, il semblait vraiment touché par l'attention. Elle l'observa aller changer le disque pour mettre celui qu'elle venait de lui offrir… il manipulait son tourne-disque et ses vinyles avec tant de délicatesse… Elle rougit légèrement quand il la fixa un instant avant de lancer le disque. Ne pouvant détourner les yeux, elle le regarda fermer les yeux quelques secondes qui semblèrent durer une éternité tandis que la musique s'élevait dans la pièce. Le disquaire de la Nouvelle Orléans avait raison, le son était particulier. Et puis Nate se leva pour la rejoindre, elle sut tout de suite qu'il avait une idée derrière la tête mais elle fut étonnée quand il lui tendit simplement une main. Danser ? Elle saisit sa main et se leva, se retrouvant vite dans les bras de son homme. Ils dansèrent, le temps d'une chanson. Elle posa sa joue sur son épaule et profita de ce contact si apaisant, si doux. Elle frissonna doucement mais garda les yeux fermés tandis que les doigts de Nate découvraient sa peau avec douceur et tendresse. Elle se laissa guider quand il la fit se redresser pour joindre ses lèvres aux siennes. Une pointe d'étonnement la parcourut, elle n'avait pas l'habitude que ce genre de contact se termine par un baiser si chaste et même si elle adorait quand il ne l'était pas, chaste, elle apprécia ce moment particulier. La soirée était loin d'être finie.

Elle sentit un léger changement dans l'attitude de son compagnon, sans pouvoir vraiment dire d'où il venait et puis elle le laissa la quitter un instant pour attraper le second cadeau qu'il lui remit. Un écrin à collier. Curieuse, elle se demandait quel genre de bijoux il avait acheté. Nate avait toujours bon goût, elle lui faisait confiance. Alors qu'elle commença à ouvrir l'écrin, Nate prononça son prénom mais elle ne releva pas la tête, trop curieuse de découvrir ce qu'il y avait dans cette boîte. Une clé. Les yeux grands ouverts de surprise, il lui fallut un instant pour comprendre ce que c'était… La clé de chez lui ? La panique monta. Lui proposait-il de venir vivre ici ? Le bonheur gonfla également son cœur, mais la panique restait bien présente comme toujours. Étaient-ils prêts à franchir ce pas gigantesque ? Etait-elle prête à cela ? Et lui l'était-il ? S'il lui offrait cette clé, peut-être, mais malgré tout elle n'en était pas sûre, ni pour elle, ni pour lui. La seule fois où elle avait vécu avec un homme avec qui elle sortait, ça avait commencé par une colocation, continué en couple et puis viré au drame… et puis ils étaient si différents tous les deux, bien qu'ils s'accordent plutôt bien. Son cerveau fonctionnait à cent à l'heure, l'impression d'un fil de pensée qui avait duré des heures alors que seulement quelques secondes étaient passées.

Elle leva son visage vers Nate quand il se mit à parler. Elle l'écouta attentivement. Il ne semblait pas totalement à l'aise… elle eut presque envie de dire quelque chose, de prendre ses mains, de le rassurer mais elle n'en fit rien… elle le laisserait aller au bout de sa tirade. Il était conscient que c'était tôt pour venir s'installer ici et il ne le lui demandait pas, mais elle le pouvait si elle le voulait et surtout il voulait qu'elle se sente à l'aise pour venir ici quand elle le souhaitait. Elle cligna des yeux, repoussant les larmes qui menaçaient… mais suffisamment éloignée encore pour qu'il ne le remarque pas. Il voulait en parler à Joyce, d'eux, de leur couple, du fait qu'elle comptait pour lui. C'était sûrement l'une des plus belles déclarations… et peut-être bien la meilleure qu'il pourrait lui faire… mais elle se trompait. Oh comme elle se trompait lourdement. Elle n'avait clairement pas vu arriver la suite. À vrai dire, elle n'avait rien vu arriver du tout... Il pensait ne jamais pouvoir effacer ses erreurs. Cela la rendait triste et elle avait simplement envie de le prendre dans ses bras… "Je suis fou de toi, Casey…"

Son cerveau arrêta de fonctionner durant un instant. Qu'avait-il dit ? Avait-elle bien entendu ? Elle se mit à trembler légèrement. L'observant, elle remarqua sa nervosité soudaine, sa fébrilité. Il avait le regard fuyant au lieu du regard franc habituel. Les yeux humides, cette fois, il le verrait s'il la regardait… elle s'approcha de lui et prit son visage entre ses mains. Elle posa ses lèvres sur les siennes et lui sourit. Elle n'avait aucune idée de comment il réagirait à ses mots, mais tant pis. Il lui avait ouvert son cœur, elle allait faire de même. "Nate, je t'aime." Elle posa une seconde ses lèvres sur les siennes. Dans le fond, c'était aussi simple que cela. Elle était amoureuse de cet homme depuis des mois déjà et cela n'avait pas cessé, malgré le silence radio, malgré la froideur qu'elle avait découverte chez lui… Elle ne s'en était rendu compte relativement récemment, mais ça ne changeait rien à tout cela. "Les erreurs font partie de la vie, quel besoin de les effacer." Et ceci, elle le pensait vraiment. Elle n'était pas vierge d'erreur, elle en avait eu son lot également. "Je ne suis pas sûre d'être prête à venir vivre ici, mais j'accepte cette clé avec plaisir. Je me sens bien ici, chez toi, peut-être bien un peu chez nous aussi…" Des larmes se mirent à couler sur ses joues, pas de tristesse, le sourire qu'elle arborait encore en était la preuve. Son cœur gonflé d'amour, elle se blottit entre ses bras. "Tu voudrais bien me le redire ?" Un léger rire lui échappa tandis qu'elle releva la tête. Les larmes avaient cessé même si elles avaient laissé des traces humides sur ses joues.